jeudi 16 juillet 2009

Polvos que echar

Alors ça s’accumule et te bourre la piaule.
T’auras beau faire gaffe tant que tu voudras, il en vient
Toujours un petit peu de nouveau pour s’ajouter. Tu peux
Garder les fenêtres fermées, n’ouvrir la porte à personne, ton
Facteur inclus, refusant tous les recommandés qu’on t’adresse –
Ça continue de s’accumuler. Serait-ce que toutes ces cochonneries
Proviendraient en fait non de l’extérieur mais du fond de toi-même ?
Toutefois, elles sont comme la semence dont on souhaite se débarrasser.

Une fois la saleté éjectée, t’es calme pendant un moment ; c’est l’espoir
Du grand ménage. Sera-t-il comblé ? Fumant ta cigarette, allongé sur
Le sofa, le regard vide, près de toi ce tapis qui a dû s’accommoder
Du passage de l’aspirateur – voilà du soulagement. A-t-il joui ?
Tu n’en sais rien, et peu importe ; l’important c’est qu’il est
Propre maintenant. Même s’il ne le restera pas longtemps.
On ne se refait pas une virginité, mais il faut se resalir.
Belle différence entre poussière et semence.

16 Juillet 2009

mardi 14 juillet 2009

Another Fine Journey

[Le jour se lève, moi dans mon lit, les hirondelles matinales frôlant bruyamment la fenêtre ouverte etc. Suit une description détaillée dudit jour qui se lève, mais certainement vu de mon pieu.]

Your odds of arriving safely are
In the low one-digit ballpark, he said.
But I didn’t make any bet, I said;
And furthermore, see, I’m on no journey.
Sure you did, sure you are, he answered.
You won’t linger all along anyhow.
Felt him sort of crack down on prostrated me.
You are on a travel fraught with peril, he said;
Thy hope is blind, thy luck is skewed
So let’s face it: the fare is fairly too high.
I simply try to keep staying abed, I said.
The odds are against it, quoth he.

Is there still a thrill in going places, or
Even a bit of an urge to shift elsewhere
For the one au jus used to the usual? He
Doesn’t hold that things how they are are
Unbearable and that one’s got to get out of it
That anybed is better than this one, any future
Is a gas--he is neither too bored nor too yearning
Yet insidiously he moves, the odds stack up this way.
That’s why this buzzer did threaten me, I guess.

[Créature de luxe qui risque, bêtement, sa vie pour un exploit. Celui qui connaît les aléas de la vie, l’esquimau dans le vrai quoi, n’est ni assez fortuné ni assez ennuyé pour se permettre ce sport de riche qu’est la tentative de suicide ; lui, du bête et du périlleux, il l’a à la pelle et à l’œil. L’esquimau n’a qu’à rester dans son milieu hostile, et c’est tout.]

July 14, 2009

lundi 13 juillet 2009

Un vieux chandelier tout noirci

Le chandelier en argent déniché aux Puces
Si noble au milieu du fatras – une apparition.

Maintenant, tiré du bordel des caissons, sauvé pensions-nous
Ayant trouvé sa niche à la maison, joliment
Donc à sa place, ce chandelier n’a plus guère d’attrait.

Mais comment demeurer dans le fatras, en vrac, pas à sa place
Pour briller comme le diamant dans un fumier ?

Trop rangée l’existence, et on ose appeler ça un sauvetage.
Ce n’est pas depuis hier qu’on doit s’en contenter.

– Cesse de te comparer à un candélabre, dit l’autre.
T’es pas aussi lumineux que cela, par exemple.


[Ein alter, ganz schwarz gewordener Kerzenleuchter

Der silberne Kerzenleuchter vom Flohmarkt
So edel zwischen all dem Gerümpel, in all den Kisten –
Eine Erscheinung.

Jetzt steht er zu Hause, scheinbar gerettet, hat seine Nische gefunden
Zu aufgeräumt steht er da, seinen Reiz hat er fast verloren.

Doch wie zwischen Gerümpel und in Unordnung fortbestehn
Um wie ein Diamant daraus hervor zu scheinen?

Zu geordnet das Leben, und man wagt das eine Rettung zu nennen.
Nicht erst seit gestern müssen wir uns damit begnügen.

Hör auf, dich mit einem Kandelaber zu vergleichen, sagt eine.
So leuchtend bist du zum Beispiel auch wieder nicht.]

10 Juillet 2009

dimanche 12 juillet 2009

Nocturnes détritus etc.

Starting with Denby’s nightly luck litter

[De nocturnes détritus sous une enseigne lumineuse, l’idylle de la déchetterie enneigée, le bidonville filmé par un maître – l’œil se laisse tromper ; ainsi l’oreille éduquée. Mais pas le nez. Jusqu’à présent, personne n’a pu vendre la puanteur pour du parfum. Sauf le fumet d’un chéri.

Exhalaison corporelle, relent de bave sur un oreiller : la source des odeurs, il faut donc la transformer d’abord en quelque chose relevant du beau légionnaire. Cela semble facile, mais ne l’est pas.

Pour voir, ou même entendre, du joli là où il n’existe pas, ou plus, personne n’est obligé de devenir d’abord un peu fou, un peu pervers, capable de s’inventer toute une manœuvre à Djibouti. Ton pif, tu t’en méfies aussi, mais personne d’autre que toi n’arrive à le tromper. S’il te trompe, tu te l’es imposé toi-même. On ne lui fait pas le vieux coup de la neige ; le vieux coup de la sueur chérie – notamment chérie partie – tu te le fais toi-même.]


A wealth so bodily, in rain or shine
Fountain of images, and sounds, and smell;
And if, profuse as hell, you shed them well–
That darling stink I drink stays purely mine.

I suck it off all linens since you’re out
And images and sounds have died away:
Image was garish, sound was shrill and loud
But noisome stink recalls you calm and gray.

How deep that plain delight when late so smooth
The gonads still reveal themselves as if
The hidden core and the lost scale of truth
Could be detected afterwards, by sniff.

No run-off beaut comes blemished by some reek
No love is lost a doting schnoz doth seek.


[Scheint Kehricht auch im Mondschein wunderschön
Des Kehrichts Eigenschaft bleibt brav bestehn.

Doch ein Gestank, falls froh geatmet nur

Verliert ganz augenblicklich seine Stinknatur.

Wie kann das sein? Weil er nicht leiblich ist
Wie auf der nächtlichen Chaussee die Häuflein Dreck?

Des Menschen Geisthauch, vom Gestank geküsst

Erwittert seinesgleich, und seinen Zweck.]

July 7, 2009

samedi 11 juillet 2009

En ville et chez soi

C’est qu’on s’en fout de moi dans la grande ville.
On me laisse observer
Ce qui évolue pour soi-même
Et pas seulement ce qui a besoin de moi pour vivre.

Le mètre carré y est cher
Ma solitude doit se contenter de peu.
Mais j’ai une glace qui agrandit la pièce
Et pas seulement.

Trop de murs, il fait chaud, je me reflète dedans.
Je suis à poil, dis donc. Même si on s’en fout de moi
Ce n’est pas comme ça que je sortirai me promener.
En ville, je ne suis pas chez moi.

Ne pas être chez soi est la condition même
D’une existence passionnante, n’est-ce pas.
Lorsque j’en aurai la force, je mettrai quelque chose
Pour continuer à me fondre.

Est-ce que le provincial peut comprendre, lui
Dans sa bicoque immense, habitué à son chez lui
Qui englobe ses voisins et les voisins de ses voisins ?
Il n’a qu’une réputation à soigner.

Alors que de moi, en ville, on s’en fout.
Ce provincial, je le reconnais, il est bruyant
On le remarque, tant il fait, en goguette, partie
Du décor urbain. Puisque moi, j’y suis chez moi.

Tu te contredis ! me dira-t-il, car il est perspicace.
Mais qu’il se force seulement à observer, lui aussi
Ce qui évolue pour soi-même ; ensuite il
Finira par comprendre tout le tâtonnement des êtres.

4 Juillet 2009

jeudi 2 juillet 2009

Poultry / Geflügel / Volaille


Poultry



Fowl Logics

Battery chicken
Or free-range chicken;
And where would you live?

Preferably in the open run!
Says man who knows
What he says.

A larger life space
Means better meat quality.
But is this reason for urban exodus?

Man who is not a man-eater
Has first tried battery
On himself.

Ever since, the boonies bore him stiff.
As for the pullets’ needs
His mind is made up.


Via the Gut

We are fond of petting our puppies and pussies
All psyched up while following the galloping colts
But no beast is more familiar to us than the pullet.

We are acquainted with its skin, its muscles and carcass
Simply wondering whether the viscera are duly located
For we encounter them in sort of a mess.

Gut knowledge
Is the deepest one. The proof is done.
The Chinese may have some clue about their dogs.

Are we to blame because
We aren’t indeed very sensitive to these beings
We admittedly know inside out?


Kappores

Poultry often flailing as if
Their lives were still at stake
While already short of their heads.

Swinging the unbeheaded
Rooster for atonement––however
Not a headless endeavor.

Despite all appearances
Judgment day doesn’t yet lie behind.
Just wings that flap away into it

Heading for their just deserts.
I mean these vans, but not
Those crowskulls.

June 28 – July 1, 2009


Geflügel


Hühnchenlogik

Batteriehühnchen
Oder Freilandhühnchen;
Und wo würdest Du gerne leben?

Natürlich auf dem freien Land!
Sagt der Mensch, der weiß
Was er sagt.

Je freilebender
Desto besser das Fleisch.
Aber ist das ein Grund für Stadtflucht?

Der Mensch, der sich nicht selber frisst
Hat das Batterieleben zuerst
Bei sich getestet.

Seither langweilt er sich in der Pampa zu Tode.
Was die Bedürfnisse von Hühnchen angeht
Steht seine Meinung fest.


Über den Bauch

Wir streicheln unsere Hündchen und Kätzchen
Verfolgen fiebernd junger Pferde Galopp
Doch ist kein Tier uns so vertraut wie das Hühnchen.

Wir kennen seine Haut, seine Muskeln, das Skelett
Und fragen uns nur, was den genauen Sitz der Eingeweide angeht
Die man bar jeder glaubhaften Ordnung vorfindet.

Die Kenntnis durch den Bauch
Ist die tiefste, der Beweis ist erbracht.
Die Chinesen haben vielleicht eine Ahnung von ihren Hunden.

Sind wir zu schelten
Weil wir so wenig empfinden diesen Wesen gegenüber
Die wir doch in- und auswendig kennen?


Kappores

Geflügel, das oft mit den Flügeln schlägt
Als ob es noch um sein Leben ginge
Dabei fehlt schon der Kopf.

Das Schwingen des ungeköpften
Hahns zur Versöhnung ist
Dennoch kein kopfloses Unterfangen.

Allem Anschein zum Trotz liegt
Der Tag des Gerichts noch nicht hinter uns.
Nur Flügel, die ihm entgegenflattern

Hals über Kopf hin zum Wohlverdienten.
Die Schwingen, meine ich, nicht
Die krähenden Schädel.

29. Juni – 1. Juli 2009


Volaille


Loqique à poulet

Poulet de batterie
Poulet élevé en plein air ;
Et toi, tu voudrais vivre où ?

Certainement à l’air libre !
Dit l’homme qui sait
Ce qu’il dit.

Davantage d’espace vital
Améliore la qualité de la viande.
Mais est-ce une raison pour fuir la ville ?

Ne se bouffant pas lui-même, l’homme
A testé la vie en batterie
D’abord sur lui.

Depuis, il s’ennuie à mort en cambrousse.
Quant aux besoins des poulets
Son opinion est faite.


Par le ventre

Nous caressons nos chiots et nos chatons
Nous observons, fiévreux, les poulains au galop
Mais aucune bête nous est aussi familière que le poulet.

Nous en connaissons la peau, les muscles et la carcasse
Doutant seulement de l’emplacement des viscères
Que l’on y trouve rangés n’importe comment.

La connaissance par le ventre
Est la plus profonde. La preuve est faite.
Les Chinois ont peut-être une idée de leurs chiens.

Sommes-nous à blâmer
Car guère sensibles à ces êtres
Que nous connaissons pourtant jusqu’au fond ?


Kapparoth

Volaille qui souvent bat des ailes
Comme s’il en allait encore de sa vie
Alors qu’il manque déjà la tête.

Faire tournoyer le coq
Non décapité pour le grand pardon
N’est pourtant pas une entreprise écervelée.

Malgré les apparences
Le jour du jugement n’est pas derrière.
Seulement ces ailes qui s’élancent vers lui

Se précipitant vers la juste récompense.
Je parle des ailes, bien entendu
Et non pas des têtes à caquet.

29 Juin – 1er Juillet 2009

mercredi 1 juillet 2009

Never Complain

Like Emily I cope without much ear
Don’t even miss the audience I lack;
The prowling desert silences I hear
Are apt enough remark in feeding back.

By night, the shutters wrangle over me
By day, I drown out, grappling with myself;
One single fate awaits all scribblery –
So many books keep sleeping on my shelf.

Rip out some pages, wad them into balls
Put back the pristine work, no loss occurred;
No other luck for these unprinted scrawls:
No crumpling ever scratched one single word.

June 14, 2009

Ne jamais se plaindre

Comme Emily, je me débrouille sans
Oreille, et elle ne me manque pas :
Les bruits de vaine errance que j’entends –
Assez d’écho pour quelqu’un comme moi.

La nuit, mes volets font les commentaires
Le jour, grinçant plus fort, je les fais taire.
Tout gribouillis, un même sort sévère :
Que de bouquins dormant sur l’étagère...

Tire une feuille et mets-la en boulette
Repose l’œuvre – point de différence !
Texte imprimé ou pas, pareil, par chance
Le balancer n’en ôte aucune lettre.

15 Juin 2009

Niemals klagen

Wie Emily brauch ich kein Publikum
Was ich nicht kenne, misse ich auch nicht;
Das Einödrauschen rings um mich herum
Genügt als Resonanz für mich.

Nachts rezensieren mich die Fensterläden
Tagsüber falle ich mir selbst ins Wort;
Allem Geschreibsel droht dasselbe: Weh den
Kadavern auf dem Bücherbord!

Reiß Blätter aus, zerknüll sie, stell den Schmöker
Zurück – dem Rücken ist nichts anzusehn;
Handschriftgekrakel oder vom Verleger
Gedruckt: die Sätze bleiben stehn.

16. Juni 2009